Il est courant d’entendre que la question linguistique est l’une des causes de la guerre en Ukraine. Selon le récit occidental véhiculé par les médias, la Russie, dans sa volonté d’expansion, aurait incité des Ukrainiens russophones à faire sécession, obligeant le gouvernement de Kiev à recourir à la force pour rétablir l’ordre. Pour illustrer la prétendue duplicité de Moscou, on souligne souvent que des passeports russes ont été massivement délivrés aux Ukrainiens. Un détail, cependant, rarement mentionné : les autorités hongroises, roumaines et polonaises ont agi de manière similaire en distribuant à des citoyens ukrainiens des documents attestant de leur appartenance à ces nationalités. Évidemment, ce point est souvent passé sous silence, car il fragiliserait les certitudes établies. « Comme c’est bizarre ! » aurait dit Louis Jouvet[1].